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FACT CHECKING/Crise dans l’Église catholique à Man : le tribalisme fait son apparition

Le temps a passé, depuis que l’évêque de Man s’est fendu d’une lettre ouverte à la radio de son diocèse pour accuser ses prêtres de faits graves liés à leurs engagements sacerdotaux. À la date d’aujourd’hui, il n’y a aucune perspective de réconciliation. Et le boulevard semble ouvert pour que les communautés ethniques et tribales en fassent une récupération.

La crise dans l’Église de Man est profonde et joue la crédibilité de l’Église catholique à gérer ses propres problèmes. Après que Mgr Béby Gaspard eut publié sa lettre ouverte contre ses prêtres, le clergé a tout de suite saisi Rome, le Nonce apostolique et le président de la Conférence des évêques de Côte d’Ivoire.

Le président de la Conférence s’est alors lui-même déplacé à Man pour écouter de vives voix et inviter au calme, les prêtres qui avaient décidé de faire une conférence de presse en réponse à leur évêque.

À la fin du mois de janvier 2024, à Katiola, les évêques de Côte d’Ivoire auraient demandé à un comité de sages de trouver une solution à cette crise. Ce comité aurait donné des conseils à Mgr Béby Gaspard et lui aurait demandé d’écrire une lettre d’excuse à ses prêtres. Aux dires des prêtres de Man, la lettre leur aurait été portée par le président de la Conférence, Mgr Marcellin Kouadio.

La stratégie de reconquête de son diocèse par Mgr Béby

À la fin de leurs travaux, après avoir accepté d’écrire la lettre d’excuse et de demande de pardon à ses prêtres, Mgr Béby serait parti aussitôt à Korhogo, chez l’archevêque des lieux, qui serait son ami. Et c’est là que, selon nos interlocuteurs, il aurait planifié sa reconquête du diocèse dans lequel les prêtres ne veulent plus de lui.

Rentré à Man avant le mercredi des Cendres qui ouvre le temps de carême, Mgr Béby Gaspard s’est signalé de nouveau, comme un évêque autoritaire, en faisant reprendre une messe déjà commencée, à laquelle il s’était signalé pour la présider et où il n’est pas arrivé à temps. Son comportement a laissé les chrétiens présents ce jour-là dans une grande affliction. Cela ne lui a pas suffi, les prêtres de son diocèse estiment que chaque fois qu’il fait sa catéchèse à la radio catholique, il les nargue par des propos allusifs déplacés. Comment croire alors à ses excuses et à sa demande de pardon, s’interrogent les prêtres de Man ?

L’un dans l’autre, à la dernière réunion que Mgr Marcellin Kouadio a eue avec les prêtres de Man, ils lui ont clairement dit qu’ils apprécient sa démarche et acceptent le pardon de Mgr Béby. Quant à l’accepter lui-même comme leur évêque, les prêtres ont avoué ne plus avoir confiance en lui, puisque depuis une quinzaine d’années, il a refusé d’être pour eux un bon pasteur. Son manque de charité a éloigné plusieurs prêtres du diocèse et ceux qui sont restés vivent dans la peur de son autoritarisme. Les accusations non fondées contre ses propres prêtres pour se venger de leur désir exprimé d’un diocèse qui témoigne de l’Évangile,  montre qu’il s’est lui-même disqualifié pour agir au nom de Jésus au milieu d’eux. Il lui appartient de tirer les conséquences de sa conception erronée du ministère d’un évêque.

Cinquante-quatre prêtres sur soixante ont signé le texte lu devant Mgr Marcellin Kouadio. Un texte qui peut être consulté sur les réseaux sociaux.

La situation reste difficile pour les chrétiens, même si Mgr Béby fait croire qu’il est au contrôle du diocèse de Man. Et c’est là qu’une nouvelle donne doit être prise en considération pour que le combat des prêtres de Man ne s’assimile pas à une question tribale.

Mgr Béby et sa tribu dans la crise

Ces derniers temps, des informations malveillantes ont circulé, faisant état du fait que Mgr Béby serait victime de tribalisme dans le diocèse de Man. Laquelle des nombreuses tribus dont les prêtres sont issus ne voudrait pas de lui à Man ?  Des faits objectifs existeraient, que tous les prêtres de Man disent connaître, qui présentent Mgr Béby comme un vrai partisan du tribalisme. Il ne pourrait par conséquent être une victime dans un problème que lui seul a provoqué.

C’est pourquoi les prêtres de Man disent être surpris d’apprendre que la tribu de laquelle est issu Mgr Béby, dans l’archidiocèse de Gagnoa, se serait mobilisée pour secourir leur frère. Personne ne peut les en empêcher. Mais alors, il faudrait sortir d’une approche tribaliste d’un problème d’Église. Ce qui est reproché à Mgr Béby, c’est qu’il est invivable et n’a pas le cœur de quelqu’un qui représente Jésus.

La mobilisation de certains prêtres de Gagnoa, en vue de sauver Mgr Béby, est donc très mal perçue par les prêtres de Man. Que des prêtres, dont certains auraient été, ouvertement ou discrètement, au cœur du départ de Mgr Aké de Gagnoa, se mobilisent pour trouver une issue favorable à la crise de Man dans le sens de faire en sorte que Mgr Béby reste, est inopportun selon les prêtres de Man, et même dénué de tout esprit de charité. Pourquoi Mgr Aké mériterait d’être remercié par le Pape, ce dont la plupart des prêtres de Gagnoa se sont réjouis,  et que pour les mêmes faits ou plus graves, les prêtres de Man devraient accepter quelqu’un qui les opprime depuis son arrivée et qui n’a aucune compassion pour personne ?

Vivement que le Pape intervienne dans cette affaire qui n’a que trop duré. Sinon, la crise est partie pour dépasser les limites du diocèse de Man.